Nous, associations, acteurs et actrices de la solidarité,
alertons sur l'impact social de l'organisation
des Jeux Olympiques et Paralympiques, et plaidons pour un héritage positif dans la lutte contre l'exclusion.

La fête olympique peut-elle être joyeuse et populaire si pendant les Jeux, des milliers de personnes, dont des familles et des enfants, dorment chaque soir dans la rue ?

Les Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 seront le plus grand événement jamais organisé en France. Imaginés pour être une grande fête populaire, ces Jeux portent également une promesse inédite d’engagement social pour léguer en héritage une société plus inclusive.

 

Cependant, le nombre de personnes en situation de rue et de grande précarité augmente de façon inquiétante. Sur le terrain, nous constatons des effets très préoccupants de la préparation des Jeux en Ile de France: expulsions forcées de populations en situation d’habitat informel et précaire, éloignement des personnes en situation de rue ou que l’on voudrait invisibiliser de l’espace public. 

 

De nombreuses publications révèlent que les éditions précédentes des Jeux ont entraîné de tels effets importants de « nettoyage social » dans les villes hôtes. Pour tenir sa promesse d’héritage social positif, Paris 2024 doit être une édition différente !

Notre campagne “le revers de la médaille”

Le 30 octobre 2023, nous publions une  lettre ouverte interpellant Comité d’Organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques, les  élus et pouvoirs publics, les sponsors et et partenaires des Jeux sur les risques qui pèsent sur les populations en situation d’exclusion et de précarité en raison des bouleversements prévus à Paris et en Ile-de-France et pour ne pas laisser l’exclusion en héritage.

Rassemblées en collectif, plus de 80 associations de solidarité qui agissent au qui agissent au quotidien auprès des personnes en situation de précarité  (personnes sans-abri ou mal logées, usagers de drogues, travailleuses du sexe, personnes exilées, bénéficiaires de l’aide alimentaire…) se mobilisent pour que la dynamique des Jeux ne soit pas synonyme de renforcement de l’exclusion, mais qu’au contraire ils lèguent un héritage social positif.

Nous sommes force de proposition !

Nous interpellons les pouvoirs publics et les organisateurs des Jeux afin qu’ils prennent la mesure de l’urgence sociale actuelle et que nous puissions réagir collectivement. Nous demandons que soit mis en place de façon concertée un véritable plan pour la prise en charge des personnes en situation de précarité avant et pendant la durée des Jeux, ainsi que de dédier un volet de l’héritage des Jeux à l’amélioration dans la durée de leur situation. 

Occupation de l’espace public
Il existe de nombreux lieux de vie informels et secteurs d’occupation en Ile de France, personnes sans-abri isolées, campements, squats et bidonvilles. Les expulsions sans solution d’hébergement ou de relogement s’accélèrent à l’approche des Jeux. La répression envers les personnes occupant l’espace public telles que usager.ère.s de drogues ou travailleur.euse.s du sexe s’accentue également. Le risque d’accentuer la précarité et de perdre lien avec les acteurs sociaux sont importants. Nos propositions pour l’espace public permettent d’y faire face, grâce à des solutions d’hébergement et de concertation avec les organisations qui agissent auprès de ces publics.

Alimentation et accès à l’eau

1 million de repas sont distribués chaque mois gratuitement à Paris dans plus de 350 lieux, soit 30 000 personnes qui chaque jour dépendent de l’aide alimentaire pour faire bien souvent leur seul vrai repas de la journée. Le public ayant recours à l’aide alimentaire est très divers : moitié vivent dans leur logement, moitié sans-abri, hébergement d’urgence, informel ou précaire. L’organisation des Jeux bouleverse la tenue de nombre de points de distribution, les rendant impossible ou difficile d’accès et faisant craindre un non-recours important. Nos propositions sur l’alimentation et l’accès à l’eau visent à assurer la continuité et l’adaptation des dispositifs à l’approche et pendant les Jeux, afin que chacun puisse continuer à se nourrir convenablement.

Santé, prévention, réduction des risques

L’écosystème de la santé accompagnant les personnes en situation de précarité est vaste et fait intervenir de nombreux·ses acteur·rice·s. Bien que pouvant être globalement considérée comme une région privilégiée, l’Île-de-France est marquée par de très fortes inégalités, avec des problématiques d’accès aux soins, liées à des barrières d’accès ou de connaissances des droits. Ces barrières sont particulièrement importantes pour les populations exilées ou en situation de vulnérabilité (précarité, travail du sexe, usagers de drogues, etc.).

Dans un contexte d’un système hospitalier et un écosystème de la prévention, de la Réduction des Risques et de la santé déjà en crise, nous identifions un risque de barrières accru à l’accès à la prévention, à la Réduction des Risques et aux soins pour les plus vulnérables : capacité d’aller-vers réduite, risque de rupture dans les parcours de soin, risque d’une plus grande vulnérabilités des travailleur.euses du sexe et usager.ère.s de produits. 

Nos propositions sur la santé, prévention, réduction des risques visent à assurer la continuité et l’adaptation des dispositifs d’accès aux soins pour toutes et tous.

Hébergement

Plus de 3 500 personnes sans-abri ont été décomptées dans le cadre de la 7e édition de la Nuit de la Solidarité à Paris en janvier 2024, en augmentation de 16% par rapport à l’année précédente. L’Ile-de-France est la région qui comptabilise le plus grand nombre de personnes en famille en demandes d’hébergement d’urgence non pourvues. À Paris comme dans le Grand Paris, trois personnes interrogées sur quatre n’appellent pas ou plus le 115, alors que le nombre d’appels est en hausse et que la part de personnes ayant appelé le soir même augmente. Pourtant la loi stipule que “toute personne sans abri en situation de détresse médicale, psychique ou sociale a accès, à tout moment, à un dispositif d’hébergement d’urgence” et cela est de la responsabilité de l’Etat. Afin que personne ne dorme à la rue à l’approche et pendant les Jeux, nous formulons des propositions en matière d’hébergement, en particulier celle d’une centre humanitaire de premier accueil des personnes exilées, rappelant par ailleurs le besoin de création de 20 000 place d’hébergement d’urgence supplémentaire en France, dont 7 000 en Ile de France.

Accès au droit

Nous identifions un impact des Jeux sur l’accès des bénévoles et professionnels de l’accès au droit (en maraude et sur les lieux fixes) à leurs lieux ou zones de travail, en particulier celles se trouvant à proximité de sites Olympiques ou lieux de festivités, la nécessité éventuelle d’adapter les dispositifs pour assurer la continuité du travail social, sachant l’importance de ne pas trop déplacer ces lieux, identifiés par les personnes concernées. Le respect des droits des personnes en situation de rue est particulièrement à risque. Pour cela, nous formulons des propositions relatives à l’accès au droit pour garantir son application auprès des publics les plus vulnérables.

A quelques semaines des Jeux, il est encore temps d’agir. Nous ne sommes pas prêts, mais nous pouvons et nous nous devons de l’être.

Nous appelons tout d’abord à la mise en place d’une médiation effective avec les préfectures et les services de police pour prévenir tout risque de nettoyage social observé sur les éditions précédentes et à Paris à l’approche des Jeux.

 Nous proposons ensuite la constitution d’un Fonds de Solidarité “olympique”, à destination des acteurs associatifs pour soutenir la continuité, l’adaptation et la mise en place des dispositifs sociaux avant, pendant et après les JO, en particulier pour l’aide alimentaire, accès aux soins et à la prévention, accueil social…

 Enfin, nous pensons que l’héritage des Jeux doit se matérialiser par des solutions d’hébergement et d’accueil, pour la sortie de rue pérenne du plus grand nombre de personnes sans domicile : avec et la mise en place pérenne d’un centre de premier accueil humanitaire des personnes exilées à Paris et la création nette de 20 000 places d’hébergement à l’échelle nationale, dont au moins 7 000 en Île-de-France.

 

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